La pêche durable pourra-t-elle durer ?
Quand on achète du poisson, on entend parfois parler de pêche durable. On devine bien qu’il doit s’agir plus ou moins de respect de l’environnement, mais bien souvent, on ignore les détails.
Techniquement, une pêche durable est une pêche qui, sur le long terme, ne remet pas en cause la pérennité des espèces de poissons pêchées. En la matière, l’Union européenne avait fixé un but : atteindre 100% de pêche durable pour 2020. Il faut dire qu’on partait de loin, puisqu’en 2000, la part de poisson débarqué en France et issu d’une pêche durable n’était que de 18%.
En 2022, le poisson français était pour 56% issu d’une pêche durable. On voit donc que d’un côté on est loin du compte par rapport aux objectifs communautaires. Mais si on veut voir le verre à moitié plein, on peut constater que la situation s’est grandement améliorée en une vingtaine d’années.
Des chiffres qui stagnent globalement
Alors, une bonne ou une mauvaise nouvelle ? La balance penche, hélas, du mauvais côté. Tout simplement parce que les calculs se font par rapport à un « rendement maximum durable », c’est-à-dire la quantité maximum de poissons que l’on peut pêcher sans mettre en péril le renouvellement de l’espèce sur le long terme. Ce RMD est calculé par les scientifiques sur la base de mesures et d’observations du milieu, et ce, pour chaque espèce.
Or, on constate une forte diminution de certaines populations de poissons, en lien avec le réchauffement climatique. Après, l’enchainement est inéluctable : moins de poissons, donc moins de pêche respectant le RMD (plus de surpêche). Voilà pourquoi les chiffres de pêche durable stagnent depuis quelques années.
Des différences d’une mer à l’autre
Avec des observations contrastées : la situation est dramatique pour la Méditerranée, où l’eau se réchauffe plus vite (un tiers du poisson débarqué seulement est pêché durablement). Elle a tendance à se dégrader dans le golfe de Gascogne, tandis qu’elle s’améliore (lentement) en Manche et mer du Nord.
Or, explique une scientifique, si on veut que la pêche soit vraiment durable, il faut non seulement atteindre l’objectif fixé par l’Union européenne de 100% de poissons pêchés au RMD, mais aussi s’y tenir, puisque tout ce qui est pêché au-delà de ce RMD appauvrit la ressource et de ce fait diminue le RMD en obligeant à revoir les calculs à la baisse.
Un écolabel « pêche durable »
De leur côté, les professionnels français du secteur ont bien compris le danger, qui est tout simplement le risque de disparition totale, à terme, de la filière pêche. Ils ont créé un écolabel « Pêche durable » qui garantit, avec un logo bien visible pour le consommateur, que le produit proposé répond à différents critères.
Pour obtenir ce label, les entreprises concernées, qu’elles soient de pêche ou de commercialisation, s’engagent :
– à ce que l’activité de pêche n’impacte pas de manière significative l’écosystème, que ce soit l’espèce pêchée ou d’autres espèces ;
– à ce que l’activité ait un impact limité sur l’environnement : réduire l’énergie fossile, améliorer la gestion des déchets et la prévention des pollutions ;
– à ce que les conditions de vie et de travail à bord des navires soient satisfaisantes ;
– à ce que les produits écolabellisés aient un niveau de fraicheur élevé.
Cela sera-t-il au final suffisant pour sauver la ressource en poisson sauvage et donc la pêche ? Pour répondre à cette question, rendez-vous dans 5 ou 10 ans à la poissonnerie.