Frais bancaires de traitement de succession : à quand une loi d’encadrement ?
Notre association a de nouveau été sollicitée par des adhérents qui se plaignent et s’indignent de découvrir, au décès d’un proche, que des frais bancaires de traitement de succession, parfois élevés, sont prélevés.
Les frais bancaires de succession : qu’est-ce que c’est ?
Lorsqu’une personne décède, la banque dans laquelle le défunt avait un compte doit faire un certain nombre d’actions : clôturer, transmettre les documents nécessaires au notaire et au fisc, transférer les fonds aux héritiers, etc. La banque facture le service et prélève des frais de traitement sur le compte bancaire du défunt.
Tout à fait légal
C’est légal puisque ces frais de traitement de succession sont obligatoirement inscrits sur les plaquettes tarifaires (et sur les sites des banques) à côté des tarifs des cartes de crédit et autres services. Mais il est évident que ces frais de traitement de succession ne sont pas a priori l’argument principal qui va vous décider lors du choix de votre future banque…
Oui mais ?
Ces frais de succession ne sont pas encadrés par la loi et la liberté tarifaire s’applique donc. De fait, il existe de grandes disparités entre les banques. Ces frais peuvent varier du simple au quadruple selon les banques avec une moyenne de 233 euros en moyenne et les plafonds sont aussi différents (1 000€ au CIC, 620€ au Crédit Agricole de la Touraine et du Poitou, 850€ à la Société Générale, etc.).
Ces frais ont également connu une hausse moyenne de 28 % constatée depuis 2012, trois fois supérieure à l’inflation. En 2020, le site MoneyVox, spécialisé dans les questions économiques et financières pointait, dans une étude (effectuée entre 2012 et 2020) des hausses vertigineuses : +50 % chez ING, +90 % dans de nombreuses caisses du Crédit mutuel, +119 % chez Monabanq, +123 % chez LCL, +198 % chez Allianz Banque par exemple.
Les niveaux de ces frais sont deux à trois fois supérieurs à ceux constatés chez nos voisins européens comme en Belgique, en Italie ou en Espagne et ils sont tout simplement interdits en Allemagne.
Notre association l’UFC-Que Choisir mais aussi d’autres associations d’usagers demande un encadrement de ces frais car les chiffres montrent combien les frais de succession sont déconnectés des coûts réellement supportés par les banques (article L. 133-26 du Code monétaire et financier ).
Actuellement, les banques, loin de s’autoréguler, profitent du vide législatif pour engranger avec cette « taxe de la mort » des bénéfices (150 millions d’euros) aussi économiquement injustifiés qu’immoraux.
En attente d’une loi
Le 16 janvier 2024, une proposition de loi visant « à encadrer les frais bancaires sur successions appliqués par les établissements de crédits teneurs des comptes du défunt, au titre de certaines opérations administratives et des transferts des avoirs aux héritiers » a été déposée. Elle a été adoptée en première lecture, avec modifications, et à l’unanimité, par l’Assemblée nationale le 29 février 2024 et en première lecture, avec modifications et à l’unanimité par le Sénat le 15 mai 2024.
Cette proposition de loi était un premier pas puisqu’elle prévoyait notamment le plafonnement de ces frais, et même leur interdiction pure et simple pour les héritages de moins de 5 000 euros et pour les comptes détenus par des mineurs.
Mais après la dissolution et l’élection de la nouvelle Assemblée nationale, cette proposition de loi est un peu en attente. Renseignement pris auprès de plusieurs députés (Mme Christine Pirès Beaune, porteuse du projet, M. Fournier, M. Alfandari), elle devrait être bientôt débattue à l’Assemblée mais dans un calendrier qui n’est pas encore déterminé et a priori pas avant l’an prochain.
Et le consommateur ?
Alors, il faut être clair, il n’y a pas grand-chose à faire pour l’instant : bien vérifier que ces frais sont inscrits sur la grille tarifaire de la banque du défunt, contacter le conseiller bancaire pour connaitre de quoi il s’agit et vérifier le montant calculé.
Une fois que vous savez exactement à quoi correspondent ces frais, vous pouvez tenter de les négocier auprès de la banque. Certaines banques acceptent la négociation surtout si vous êtes dans la même banque ou dans la même agence.
Mais il est sûr qu’une loi encadrant ces frais afin qu’ils correspondent vraiment au coût et au travail effectué par la banque est attendue.
Notre association locale, l’UFC-Que Choisir d’Indre-et-Loire, entend défendre ses adhérents mais aussi tous les personnes confrontées à ces frais bancaires de succession et nous restons particulièrement attachés au principe que ces frais ne dépassent pas les coûts réellement supportés par les banques pour les opérations effectuées. Pour constituer un dossier, nous entendons recueillir le maximum de témoignages sur ces frais bancaires de traitement de succession afin de les communiquer, in fine, à nos élus parlementaires.
Vous pouvez envoyer vos témoignages (avec documents si besoin) sur ces frais bancaires de succession à l’adresse suivante :
communication@indreetloire.ufcquechoisir.fr