Grande distribution : client fidèle, client masqué
Une vente de masques de protection qui interroge
Depuis le lundi 4 mai, les grandes surfaces sont autorisées à vendre des masques de protection. Des consommateurs se sont émus de la pratique de certaines enseignes à ce propos. En effet, si les masques ne sont pas en vente libre dans les rayons, des enseignes ont réservé, dans un premier temps et durant quelques jours, la vente de ce matériel aux seuls clients possesseurs de la carte de fidélité du magasin, dans le seul souci « de rationnaliser les ventes et d’éviter la rupture de stock ».
« Pour organiser la distribution en points de vente des masques dans les meilleures conditions possibles, les deux enseignes ont mis en place un dispositif permettant aux clients, porteurs d’une carte de fidélité et ayant autorisé les enseignes à leur écrire, de venir retirer une boîte de 50 masques en magasin. » (communiqué de la direction d’Intermarché et Netto).
Des consommateurs se sont interrogés sur la légalité de cette pratique.
Que dit la loi ?
La vente de ces masques dans la grande distribution, subordonnée à d’autres achats et/ou à la possession d’une carte de fidélité est admise et licite. Il s’agit en fait d’une vente liée ou subordonnée c’est-à-dire « subordonner la vente d’un produit à l’achat d’une quantité imposée ou à l’achat concomitant d’un autre produit ou d’un autre service ainsi que subordonner la prestation d’un service à celle d’un autre service ou à l’achat d’un produit » (article L. 121-11 du code de la consommation).
La réglementation en la matière a été modifiée en 2011 après un arrêt de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE). Pour qu’il y ait infraction et interdiction, il faudrait que cette vente s’accompagne d’une pratique commerciale déloyale (article L 121-1 du code de la consommation) et/ou d’une pratique commerciale trompeuse et/ou agressive.
Certaines manifestations commerciales style « foire aux vins » réservées aux seuls clients possesseurs d’une carte de fidélité, invités en avant-première relèvent de cette réglementation et nul ne s’en émeut. Il est bien entendu plus délicat d’agir ainsi durant une crise sanitaire grave pendant laquelle tensions, inquiétudes et rumeurs sont exacerbées et certains se posent la question, au-delà de la légalité, de la moralité.
Rappelons que pour l’instant les masques ne peuvent être vendus en libre-service dans les rayons et que la vente est limitée par personne. Si le prix des masques chirurgicaux, à usage unique, a été plafonné à 95 centimes d’euro l’unité, il n’y a pas, en revanche, de plafond pour les masques textiles lavables.