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Manque de pot : le retour de la moutarde tarde

 

Pourquoi manque-t-on de moutarde et est-ce que ça va durer ? Voilà la double question que se posent nombre de consommateurs.

Depuis ce printemps, les rayons de moutarde dans nos magasins d’alimentation sont vides et ont même parfois carrément disparu. Seuls quelques approvisionnements sporadiques, au coup par coup, ont permis, parfois, de fournir à quelques clients chanceux le précieux condiment. Alors, comment en est-on arrivé là ? Voici plusieurs éléments de réponse.

Les Français sont de gros consommateurs de moutarde

On peut même dire qu’ils sont les plus gros consommateurs au monde, avec en moyenne 1kg par personne et par an. C’est ce qui explique, par exemple, que certains vacanciers ont pu être étonnés de trouver cet été de la moutarde française dans les rayons des supermarchés en Espagne et au Portugal. Pour ces pays, moins gros consommateurs que nous, les stocks étaient largement suffisants.

La production française de graines est insuffisante

La culture de la moutarde en France, jadis très répandue, s’est peu à peu raréfiée. Il faut dire que la moutarde est une plante fragile, sujette aux attaques d’insectes. De plus, depuis 2019, la France interdit l’usage de certains insecticides sur les cultures, à la différence d’autres pays, beaucoup plus laxistes en la matière. Mais de toute façon, il aurait quand même fallu importer des graines en grande quantité pour satisfaire à la demande.
Les graines canadiennes victimes de la sécheresse. Le Canada fournit environ 80% des besoins en graines de la France. En 2021, la production canadienne, victime d’une grosse sécheresse, a chuté de moitié. La France aurait pu alors se tourner vers des producteurs alternatifs, et notamment l’Ukraine et la Russie. Mais là, pas besoin de faire un dessin…

La ruée vers les pots

On n’y a pas coupé : dès qu’a commencé à planer le spectre du manque de moutarde, certains se sont rués sur les pots afin de faire des stocks, ce qui a évidemment précipité et aggravé le phénomène. Les distributeurs ont pu, au coup par coup, s’approvisionner en moutarde polonaise ou tchèque, mais ils ont été obligés de contingenter la vente pour éviter, là encore, que certains ne fassent une véritable razzia sur les rayons. La bêtise humaine est décidément incommensurable !

Et maintenant ?

La filière française de culture de la moutarde s’est relancée suite à cet épisode de manque, et les chercheurs travaillent sur des variétés plus résistantes aux attaques d’insectes. La récolte 2022 a été excellente. De bon augure, donc. Parallèlement, la production canadienne doit retrouver des niveaux normaux cette année après la sécheresse 2021. Les pots de moutarde de Dijon devraient donc progressivement faire leur réapparition dès ce mois-ci. Mais ce retour à la normale ne s’effectuera que très progressivement. Par ailleurs, la loi de l’offre et de la demande a fait monter les prix en flèche, et les moutardiers achètent encore actuellement les précieuses graines au prix fort. Il ne faut donc pas s’attendre à retrouver un prix « normal » pour le pot de moutarde avant 2024.

Mais il ne faut pas se faire d’illusions : dans les prochaines années, les événements climatiques comme ce « dôme de chaleur » sur le sud du Canada vont se succéder et se multiplier, entrainant ipso facto des pénuries à répétition sur certains produits agricoles.

Et pour ceux qui voudraient déjà commencer à faire des stocks, précisons qu’il est impossible de prévoir de quel produit on manquera !